de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 20 octobre 2012

63- Femmes et guerres

Les chrétiens considèrent souvent que la sagesse des philosophes antiques a été le ferment sur lequel le christianisme a pu se développer aussi rapidement en Grèce. C'est au point que Socrate, Platon, Aristote... sont souvent représentés sur les fresques des églises, aux côtés des justes de l'Ancien Testament. 

Lorsque Saint Paul est venu prêcher à Athènes (Actes 17, 16-34), il n'a pas appelé à détruire les croyances anciennes des Grecs, mais il leur a montré comment les accomplir à travers le culte du Dieu unique vers lequel tendaient la sagesse et la grande spiritualité de ce peuple.

Dans cette spiritualité antique, il y a un fait marquant : les Grecs sont les seuls à avoir eu une femme comme déesse de la guerre : Athéna. Même les Romains, qui ont repris les dieux grecs, n'ont pas gardé une femme à ce poste stratégique, mais l'ont remplacé par Mars, un homme. Car la guerre était, bien évidemment, une affaire d'hommes. Et pourtant, n'avez-vous jamais vu une femme défendre ses enfants menacés ?

Lisez cet article dans lequel est décrit le récit d'une femme qui a décapité son violeur parce que ses enfants étaient insultés à cause du fait que son honneur avait été bafoué, en Turquie. Vous me direz peut-être que beaucoup d'hommes sont capables de tuer. C'est parfaitement vrai, mais tous se cachent pour le faire. Elle, elle est allée jeter la tête qu'elle avait coupée dans un jardin public, devant tout le monde, pour bien faire comprendre à tous que personne ne devait plus se moquer de ses enfants. Peu lui importait de savoir qu'elle serait arrêtée immédiatement. Et croyez-moi, personne ne se moquera plus jamais d'eux. 

Il y a une forme d'amour maternel irrépressible que rien ne pourra jamais arrêter. Cette femme n'a pas tué parce qu'elle avait été violée pendant plusieurs mois, mais parce qu'elle aimait ses enfants et qu'elle n'acceptait pas de voir que l'on se moquait d'eux. 

Saint Silouane dit que la perfection chrétienne consiste à avoir pour tous les hommes l'amour d'une mère. Il serait très machiste, limité intellectuellement et parfaitement illusoire de croire que l'amour d'une mère se résumerait à faire le ménage, la cuisine ou les devoirs. Il y a chez la mère une protection de ses enfants à laquelle aucune difficulté rencontrée ne pourra jamais s'opposer.

A la différence du bouddhisme, où toute forme de violence est interdite, les évêques chrétiens ont souvent béni des armées. Je ne parle bien sûr ici que des vrais évêques qui avaient à cœur de défendre leurs brebis, et non de ceux qui ont utilisé leur pouvoir pour aller asservir les autres au travers des croisades et autres guerres coloniales. Ils considéraient ceci : si vous voulez prendre ma vie, prenez-là, mais si vous touchez à mes enfants (mon peuple) alors rien ne pourra vous protéger !

C'est comme cela qu'est mort saint Kosmas d'Etolie. Il a annoncé à l'avance le jour de sa mort et la façon dont il allait mourir (étranglé par les Turcs). Il a attendu ses bourreaux et ne leur a pas opposé de résistance. Mais ce qu'il a accepté pour lui, il l'a refusé pour son peuple asservi. Il a organisé chaque village de Grèce en vue du soulèvement contre l'occupation turque et est aujourd'hui considéré comme le père de la Grèce moderne.

Lorsque les Grecs ont christianisé leurs anciennes croyances, ils avaient des tas de saints plus braves les uns que les autres qui auraient pu leur servir de protecteur. Et pourtant, c'est à celle qui représentait l'accomplissement de la femme, celle si pure qu'elle avait été jugée digne d'enfanter Dieu incarné, qu'ils confièrent leur protection et la garde de leurs remparts durant les guerres.

Dans la continuité de la protection d'Athéna en laquelle les Grecs de l'antiquité se confiaient, ils étaient persuadés que rien ne pouvait ébranler la protection de l'amour parfait de la Mère de Dieu. C'est en son honneur qu'ils ont écrit et composé un chant qui est depuis repris tous les vendredis du Grand Carême au cours d'un office dédié en son honneur, Τη Υπερμάχω :
Invincible conductrice de nos armées, à toi les accents de victoire ! Délivrée du danger, moi, ta cité, je te dédie cette action de grâces, Ô Mère de Dieu ! Toi dont la puissance est irrésistible, délivre moi de tout péril, afin que je te crie : réjouis-toi, épouse inépousée !

La version ci-dessous de Τη Υπερμάχω n'est qu'une ébauche, une recherche dans un processus de composition, mais on y retrouve cette symbiose entre la force et la douceur.



Je vois parfois des articles idiots tels : tueriez-vous un homme pour en sauver 1000 ? Ou encore, tueriez-vous un homme pour en sauver 100 ? Ou encore, tueriez-vous un homme pour en sauver 5 ? Personnellement, je n'en tuerai pas un, même pour en sauver 1000, pour une raison simple : je ne suis pas capable de rendre la vie à cet homme. Et si je ne suis pas responsable de la mort de ces 1000, alors rien ne me donne le droit d'en tuer un pour les sauver.

Avez-vous remarqué que l'on ne vous demande jamais dans ces tests de personnalité qui ressemblent souvent à du conditionnement : accepteriez-vous de mourir pour sauver 1000 hommes ? Ou encore : accepteriez-vous de mourir pour sauver 5 hommes ? Pour quelle raison ne vous pose-t-on pas cette question ? Parce que tout le monde répondrait logiquement : NON. Alors, si personne n'accepterait de mourir pour sauver 1000 hommes, de quel droit devrait-on accepter l'idée d'en tuer 1 pour en sauver 5 ?

La seule vie dont nous ayons le droit de disposer, c'est la nôtre. Je connais plusieurs mères qui n'accepteront jamais de tuer un homme, même pour en sauver 1000. Mais par contre, si l'un de leurs enfants est menacé, alors elles tueront 1000 hommes sans un frémissement pour sauver ce seul enfant.

Dieu n'est pas fou. C'est à Abraham qu'il a demandé de sacrifier son fils Isaac (Gn. 22, 1-18). Pas à Sarah ! Sinon c'est Sarah qui aurait été tentée de tuer Dieu, et je ne suis pas sûr qu'il aurait été capable de l'en empêcher... Elle aurait commencé par mettre son mari sur l'autel à la place de son fils, et aucun ange n'aurait eu la force d'arrêter son bras : plus de père des croyants, donc plus de croyants ; plus de croyants, donc plus de Dieu. Et pas un cheveu de son fils n'aurait été menacé. D'ailleurs, certaines mauvaises langues disent que ce n'est pas l'amour d'Abraham que Dieu voulait tester, mais sa connerie. Et il a arrêté son bras en voyant qu'elle n'avait pas de limite. 

Même si le paragraphe précédent est dit sous forme de boutade, puisque le sacrifice d'Abraham préfigure l'amour entier de Dieu pour les hommes, qui va jusqu'à sacrifier ce qu'il a de plus cher par amour, pour leur montrer le chemin de la Vérité et de la Vie, il n'en est pas moins vrai que Dieu n'a pas voulu qu'Isaac meure, et il n'a accepté le sacrifice du Christ que pour montrer qu'il avait le pouvoir de le ressusciter et d'abolir ainsi le pouvoir de la mort. C'est une constante de l'Orthodoxie de considérer que l'amour de Dieu ne trouve pas son accomplissement dans la mort de son fils, mais dans sa résurrection.

Si Dieu a mis l'amour d'Abraham à l'épreuve, je n'ai pas le souvenir d'une seule femme de la Bible pour laquelle Dieu ait éprouvé le besoin de tester l'amour qu'elle portait. Salomon a utilisé l'amour qu'il savait être présent chez la femme lors du jugement qui l'a rendu célèbre (1Rois 3, 16-28), mais jamais personne n'a douté que cet amour puisse avoir des limites.

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