de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

dimanche 11 mars 2012

32- Le bon pasteur, la brebis et le loup



Lorsque l'on est gêné par une situation, on préfère souvent fermer les yeux et se dire que chacun a sa vie et que ça ne nous regarde pas. La plupart du temps, c'est vrai. Sauf lorsque la personne en cause agit avec un mandat pour nous représenter : un policier qui va voler, un pompier qui va mettre le feu, un homme politique qui sera corrompu... comme je l'ai développé dans le message 2. Le cas du prêtre va encore plus loin car il se présente comme voulant nous donner un exemple pour nos vies privées.

Depuis un an maintenant, certains ont vu dans l'histoire de mademoiselle P. une immixtion dans une vie privée. Mais est-ce moi qui ai fait cette immixtion dans la vie privée du père Nicolas ? N'est-ce pas plutôt le père Nicolas qui l'a faite dans la vie de mademoiselle P. ? Lorsque le père Nicolas vient me voir pour me proposer de devenir prêtre, ne s'agit-il pas également d'une immixtion dans ma vie privée ? A quel titre son intervention dans ma vie serait-elle légitime et la mienne dans sa vie non ? Je crois que les deux interventions sont légitimes.

Si le père Nicolas est prêt à faire prendre à ma vie un cours différent, n'est-il pas juste qu'il y soit confronté lui aussi ? Qui est l'arbitre si le père Nicolas n'est pas content que je lui applique les règles qu'il veut pour moi ? Le Christ a aboli toutes les barrières entre les hommes. L’Évangile est la règle du jeu qu'il nous propose et tout le monde est à égalité dans ce jeu. Quelqu'un veut y jouer ? Alors il doit avoir conscience que cette règle est d'abord pour lui, car lorsqu'il va vouloir l'appliquer aux autres, elle lui sera opposée à chaque instant. C'est un peu comme Jumanji : si tu commences, c'est trop tard...

Que disent donc ces règles ? Si un homme a cent brebis et que l'une d'elles s'égare, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres sur les montagnes pour aller chercher celle qui s'est égarée (Matth. 18, 12) ? Ces règles disent encore : " Le mercenaire, qui n'est pas le berger, et à qui n'appartiennent pas les brebis, voit venir le loup, abandonne les brebis et prend la fuite. [...] Je suis le bon berger. Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent (Jn 10, 12-16). " 

Il y a moins de gratification immédiate à être le bon pasteur, j'en conviens. Mais mettons-nous dans la peau de celui-ci quelques minutes. La petite brebis s'est égarée, elle cherche son chemin et demande de l'aide. Elle vient d'échapper aux pièges de la montagne et a manqué de se faire dévorer déjà plusieurs fois. Dois-je lui apporter un peu d'aide, ou bien dois-je la laisser se débrouiller en pensant : " Quelle conne cette brebis, de toute façon elle est foutue, alors qu'elle se taise. Le pauvre loup ! J'espère qu'elles ne sont pas toutes aussi chiantes avec lui. Qu'est-ce qu'il doit supporter, quand même ! " Mais dire cela revient à me mettre dans le rôle du mercenaire alors que c'est le pasteur que j'essayais de cerner.

Bon ! Reprenons ! Je vois une petite brebis qui gambade et qui a tous ses problèmes au même titre que chacun d'entre vous a les siens. Elle vient me voir pour discuter. Est-ce que je dois me dire : " Hummmmm... que voici une charmante petite brebis bien appétissante ! " ? Ne serais-je pas plutôt le loup si je raisonne ainsi, malgré mon déguisement de pasteur ?

Ce n'est pas encore ça ! Comme le rôle n'est pas facile à cerner, je crois que si une petite brebis en difficulté se présente, je ne vais pas bouger. Je vais rester bien sagement à attendre que l'on ne parle plus de cette brebis. Et puis, si j'entends quelqu'un qui voudrait que la petite brebis soit aidée, je dirai que j'ai fait une enquête approfondie et qu'il ne s'est rien passé. De toute façon, si je suis le pasteur, cela signifie que les autres sont des brebis. Et, par définition, une brebis ne se plaint pas. Je n'aurai donc rien à craindre de ce côté-là. Mais est-ce que je ne redeviendrai pas alors une petite brebis comme les autres si j'adopte ce comportement, malgré mon déguisement de pasteur ?

Reprenons encore ! C'est vrai, le rôle du bon pasteur n'est pas terrible. Il était tranquille auprès de ses 100 petites brebis qui payaient toutes leur cotisation annuelle avec du lait et de la laine. Ils formaient une bonne entente. On envoyait quelques fromages au patron des différents pasteurs pour qu'il nous laisse tranquille et, d'un coup, il faut tout laisser pour une brebis que l'on n'est même pas sûr de retrouver. En plus, on risque une entorse et de perdre une autre brebis si on va chercher celle qui vient de s'enfuir.

La morale de tout ceci ? Il n'y a que lorsque vous êtes vraiment le bon pasteur que vous pouvez vous permettre d'aller demander à quelqu'un de vous suivre pour qu'il soit lui aussi pasteur. Parce que si vous êtes le loup, vous ne pourrez faire de votre recrue qu'un loup de plus. Si vous êtes une brebis, vous n'arriverez pas davantage à en faire un pasteur. Et si vous êtes mercenaire, que pourrez-vous transmettre ? C'est donc ici que s'achève l'histoire d'une vocation avortée : recruté par quelqu'un qui aime autant l'argent que les femmes et que le pouvoir ; quelqu'un tout à la fois brebis, mercenaire et loup, mais certainement pas pasteur.

Alors, comme je ne suis ni le bon pasteur, ni le mercenaire, ni le loup, c'est donc que je ne suis que la gentille petite brebis qui reste bien sagement dans le troupeau et qui se demande parfois pourquoi personne n'est allé chercher la 100ème petite brebis, et même la 99ème qui est partie aussi, et même la 98ème que l'on ne revoit plus, et peut-être encore la 97ème qui ne devait pas s'absenter longtemps, et peut-être aussi la 96ème... Et peut-être que je me demanderai aussi pourquoi on a voulu me faire disparaître du troupeau des gentilles petites brebis quand j'ai voulu savoir pourquoi il ne restait plus beaucoup d'autres gentilles petites brebis.

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