de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 19 décembre 2015

192- 1975 à 1989



Pascal Ladias est né en Grèce, en 1926. Son père était négociant en tabac. Il avait été déporté deux fois par les Bulgares. Le retour de sa seconde déportation, en 1946, coïncidait avec ce qui commençait à devenir la guerre civile grecque.

Les résistants de l’ELAS occupaient les montagnes environnant son village et recherchaient des familles aisées de sa bourgade — Proti — pour les persécuter : parmi elles, les familles Ladias et Moutsios. Le docteur Moutsios, médecin gynécologue, fut arrêté, torturé et exécuté. Il n'était pas rare que d’atroces massacres soient perpétrés, autant par les communistes que par les nationalistes, durant cette période trouble de guerre fratricide, dans cette région de Macédoine Orientale.
 
Le père de Pascal Ladias envoya son fils, âgé de vingt ans, en France. Plus précisément à Lyon, rue du Mail, à la Croix-Rousse. Il fut accueilli par son oncle, Théophanis, qui exerçait la profession de gynécologue. Il ne parlait alors pas un mot de français, et n'avait comme niveau d'étude que l'équivalent de la 4ème de collège. Pascal se rapprocha de la Communauté hellénique de Lyon.

Il entra rapidement à la faculté de médecine et obtint son diplôme. Mais, à l'époque, il ne pouvait pas exercer, car il n'avait pas son bac. Il le passa donc après être devenu médecin et le réussit. Il connut le père Vlassios à l'arrivée de celui-ci, en 1952, et c'est lui qui le maria en mars 1956.

Sa future épouse craignait que ses parents n'apprennent qu'elle fréquentait un étranger, mais Pascal fut très bien accueilli dans sa belle-famille. Il n'en fut pas de même auprès du clergé catholique, qui s'offusqua de cette union hérétique et refusa de célébrer le mariage dans l'église. À peine était-il prêt à le célébrer dans une sacristie.

Ce fut finalement le père Kalavasis, uniate, qui obtint l'autorisation de concélébrer le mariage avec le prêtre catholique, dans l'église catholique. Il était de rite byzantin, mais reconnaissait l'autorité du pape de Rome. Madame Ladias dut signer un document dans lequel elle s'engageait à trois choses : ne jamais aller voir un prêtre orthodoxe pour des sacrements, faire baptiser ses enfants et les élever dans la foi catholique, et une troisième obligation qu'elle a oubliée.

Mais c'était sans compter sur son mari et le père Vlassios. Et pendant que les invités attendaient les jeunes mariés au restaurant, les Grecs s'étaient réunis dans la nouvelle église de la Communauté, où le père Vlassios les maria suivant le rite orthodoxe (ou les remaria...).

Madame Ladias ne se cacha pas de ce qu'elle avait fait, si bien que le clergé catholique l'excommunia !

Une excommunication qui fut levée au bout de quelques temps. Le clergé pensait aux enfants à naître, qui allaient devoir être baptisés et élevés dans la Très Sainte Église Catholique Romaine.

Pascal Ladias devint le médecin et l'ami du père Vlassios, qui insista pour qu'il intègre le conseil. Il avait fermement refusé, mais le père Vlassios avait d'autorité  inscrit son nom sur la liste des candidats lors de l'AG qu'il organisa le 5 février 1978.


Le père Vlassios présida l'AG qui renouvela les 19 membres du conseil. Outre la réélection de messieurs Pappadopoulos, Kourougiorgakis, Angeloudis et Xanthos, monsieur Pascalis Ladias fut élu au poste de président. Il devenait le 10ème président de la Communauté, et le 20ème depuis 1921.

Monsieur Stavrou, son prédécesseur, était souvent en déplacement pour son travail et n'avait pu se représenter. Il était très ami avec monsieur Ladias, qui travaillait avec lui dans le même esprit.

Le conseil redeviendra complètement masculin après l'éphémère présence de madame Catherine Tsangaraki.


Le 20 mai 1978, le père Athanase Iskos arriva à Lyon. Il était auxiliaire du père Vlassios. Celui-ci fut ordonné évêque auxiliaire de Claudiopolis le 15 octobre de la même année.
 
15-10-1978 - ordination de mgr Vlassios - église orthodoxe de Lyon - archives de Lyon 3CP211 - Le Progrès du 16-10-1978


L'AG du 25 janvier 1981 se contenta de renouveler le conseil. Monsieur Ladias ne se présenta pas, si bien que monsieur Stavrou retrouva son poste de président. Monsieur Stavrou était VRP multicartes et voyageait beaucoup dans toute la France. Il aurait volontiers laissé la présidence à Pascal Ladias, si celui-ci avait pu s'en occuper. Mais comme ce n'était pas le cas et qu'il avait à cœur que la Communauté rayonne, il assuma cette responsabilité.
 
Madame Despina Balabanoglou, fille du fondateur, remplaça son père au sein du conseil, où il siégeait depuis 1947 sans discontinuer. Elle fut la seconde femme à siéger au conseil d'administration. Despina est plus connue sous le nom d'Alice.

12 avril 1981 - fête annuelle des Grecs de Lyon - Le Progrès - de gauche à droite : Despina Balabanoglou, Marie-Antoinette Ladias, Dc Pascal Ladias, Georges Stavrou et Jeannette Balabanoglou


Le cabinet d'avocats Iannucci, Lenoir et Masanovic avait écrit le 13 juillet 1983 au préfet. Mais il était resté sans réponse et écrivait à nouveau le 8 octobre, afin de solliciter des informations sur la Communauté Hellénique de Lyon. La réponse du préfet permet de comprendre que ce cabinet d'avocats s'inquiétait, au nom de ses clients, d'une donation qu'aurait pu faire monsieur Joachim Chardaloumpas avant son décès. Le préfet répondait qu'il n'était pas compétent pour statuer sur une telle requête et que, si les héritiers naturels du sus-nommé contestaient la légalité de ces donations, il leur appartenait de saisir le tribunal compétent.  

Monsieur Joachim Charaloumpas était mort sans enfants et avait légué ses biens à l'église grecque de Lyon dans des conditions douteuses. Sa nièce, Catherine Tsangarakis, avait été la première femme élue de la Communauté hellénique de Lyon, le 16 décembre 1973. Elle engagea un recours pour demander l'annulation de la donation. Recours qu'elle gagna en première instance et en appel. Nous aurons l'occasion d'y revenir ultérieurement.


Le 5 mai 1985, l'AG se réunissait afin d'élire un nouveau conseil d'administration, sous la présidence de monseigneur Vlassios. Le docteur Pascal Ladias était à nouveau élu président de la Communauté hellénique de Lyon et des environs. Despina (Alice) Balabanoglou restait secrétaire. Les autres membres du conseil changèrent peu.

Un mois plus tard, le 2 juin 1985, monseigneur Vlassios mourut à l'hôpital Saint-Joseph, à Lyon, des suites d'un infarctus.

1985-06-02 - Mort de Mgr Vlassios - Le Journal du 03-06-85


Le 18 janvier 1987, le cardinal catholique Decourtray venait prêcher dans notre église, dans le cadre de la semaine de l'unité.

18-01-1987 - le cardinal Decourtray visite la communauté hellénique de Lyon - Le Progrès du 19-01-1987


Monseigneur Mélétios resta en poste jusqu'au 9 juin 1988. Il fut remplacé par monseigneur Jérémie Calligiorgis. Ordonné prêtre le 26 juillet 1964 par son prédécesseur, il sera successivement vicaire général en 1964, puis évêque auxiliaire portant le titre d'évêque de Sassima en 1971. Il fut choisi pour assurer une continuité avec l'action de Mélétios, qu'il secondait depuis 24 ans.

Mais le synode de Constantinople qui le choisit pour ce poste oublia que si la continuité était importante, c'était bien les qualités du pasteur qu'il fallait préserver, et non celles de l'administrateur. Et monseigneur Jérémie n'avait pas le charisme de son prédécesseur.
 
Le père Athanase Iskos assuma la présidence de l'AG du 24 septembre 1989. Elle réélit le docteur Pascal Ladias à la présidence de l'association, ainsi que la majorité des membres du conseil. Ce fut notamment le cas pour Despina Balabanoglou, Georges Pappadopoulos, Stélios Kourougiorgakis et Nicolas Angeloudis.

Cependant, les règles de déclaration des membres du bureau avaient changé. Il fallait désormais indiquer pour chacun leur date et lieu de naissance, leur profession et leur adresse. Le préfet renvoya le dossier le 28 novembre afin qu'il soit complété. Ce qui fut fait le 18 janvier 1990.

Si certaines périodes avaient vu les AG espacées de plusieurs années, notamment entre 1967 et 1973, il ne faudrait que quelques jours pour que la suivante fût convoquée.

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