de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 20 septembre 2014

126- Un à j'ter, un offert !



Les journaux français, comme les journaux étrangers, s'étaient faits l'écho des mésaventures de Monseigneur Paul, évêque de Tracheia, en 2001.



Pour ceux qui ne connaissent pas son histoire, voici un bref résumé. Monseigneur Paul, affectueusement surnommé Monseigneur Paul Pot, est Anglais. Il avait été marié et, après la mort de sa femme, était devenu moine, puis évêque de Tracheia. Il disait lui-même qu'il ne savait pas où se trouvait Tracheia, vraisemblablement une ancienne ville chrétienne aujourd'hui disparue. Sans réel diocèse, il dépendait du Patriarcat de Constantinople, était rattaché à la Métropole Grecque de France, et desservait la cathédrale russe de Nice, qui était à l'époque sous la juridiction de Constantinople.

En 1999, il se prit d'amitié pour un jeune garçon de 11 ans, qu'il alla voir chez sa grand-mère et qu'il invita à Nice, lui payant tous ses frais. Mais, au retour, le garçon se plaint à la police d'agressions sexuelles. L'évêque l'aurait masturbé pendant qu'ils regardaient une vidéo comique. 

Pour sa défense, Monseigneur Paul, entendu par la police, dit qu'il souffrait de la maladie de Parkinson, et que ses gestes auraient pu être mal interprétés au moment où il aidait le jeune garçon à se mettre en pyjama. Comme si un garçon de 11 ans avait encore besoin d'aide pour mettre son pyjama... Un enfant est autonome aux alentours des 5 ans pour mettre son pyjama.

Puis, dans une seconde version, il dit que tout cela venait d'un complot russe, destiné à discréditer la Métropole Grecque afin de reprendre le contrôle de la paroisse russe de Nice. 

Les policiers remarquèrent le changement fantaisiste de version, vraisemblablement lié à une stratégie d'avocat, ainsi que de nombreuses révélations ambiguës dans ses déclarations, permettant de considérer que la plainte du jeune garçon était fondée. On peut lire, dans l'article de journal qui reprend l'affaire :
Ainsi, il reconnaît avoir, chez la grand-mère du gamin à Londres, lavé le dos de l'enfant, puis l'avoir massé. Et le juge remarque que, dans son journal intime, des passages « font état, pour les jours où vous voyez [l'enfant], d'états d'âme particulièrement douloureux pour un ecclésiastique et pouvant laisser penser que vous n'êtes pas tout à fait étranger aux faits ». L'évêque, aujourd'hui veuf, évoque dans ses écrits une « recherche frénétique des plaisirs corporels » et une « maîtrise de moi-même qui m'échappe ».
 
Il est à remarquer que, lorsqu'un homme influent se fait prendre dans une situation peu avantageuse, il a souvent une fâcheuse tendance à invoquer un complot russe. Tout le monde se souviendra de cette version de Dominique Strauss-Kahn, lorsqu'il fut accusé du viol d'une femme de chambre, à New-York. Même ces derniers temps, la thèse du complot russe est souvent mise en avant dans l'actualité pour justifier tel ou tel fait, sans davantage d'éléments probants que ceux apportés par Monseigneur Paul. Si bien que cette excuse facile ne sert souvent qu'à essayer de masquer nos propres faits inavouables. Ce ne sont pas les Russes qui ont mis les parties intimes de cet enfant dans les mains de l'évêque, ni celles de Strauss-Kahn dans la bouche de la femme de chambre... Alors cessons de raconter n'importe quoi.

S'il est vrai que la Fédération de Russie voulait récupérer la propriété de l'église de Nice pour la placer sous la juridiction du Patriarcat de Moscou, et s'il est également fort probable qu'ils n'appréciaient pas qu'un Anglais dirige l'une de leurs plus belles églises construite dans les diasporas, ils n'avaient pas besoin de ce scandale pour y arriver. Ils ont intenté une procédure judiciaire et ont gagné en première instance grâce aux actes de propriété datant d'avant la Révolution de 1917 qu'ils possédaient. Le jugement fut confirmé en appel, le 19 mai 2011, et la Métropole Grecque fut contrainte de remettre les clés de l'église au clergé russe. Les deux histoires sont séparées de douze ans et n'ont aucun lien entre elles.

L'enfant disparut au cours de l'instruction. Sa famille l'ayant vraisemblablement éloigné pour le soustraire aux pressions médiatiques et judiciaires. Si bien que le juge d'instruction, ne pouvant l'entendre, ne put poursuivre Monseigneur Paul. Le bruit courut que celui-ci était parti à l'étranger. En fait, il s'était réfugié au monastère du Père Placide, dans le Vercors, où il semble s'adonner à la vie monastique. Il y est encore aujourd'hui.

Ce retrait arrangeait tout le monde : la justice, qui savait qu'il n'exercerait plus d'autorité au sein d'une paroisse, les paroissiens de Nice, qui se débarrassaient de ce fléau encombrant, et la Métropole Grecque, qui ne savait pas encore qu'elle aurait bientôt le cas du Métropolite Emmanuel Adamakis, qui serait nommé le 20 janvier 2003, à gérer.

Avant 1998, donc avant le début de l'histoire de ce jeune garçon, qui trouve ses origines en 1999, Monseigneur Paul s'était mis à venir assez régulièrement au monastère Saint-Antoine du Père Placide. Sans nous dire quelle était la teneur de leurs conversations, le père Placide nous avait néanmoins parlé du fait que Monseigneur Paul était très ennuyé, car les familles de certains enfants de sa paroisse semblaient lui en vouloir et faisaient courir sur lui des bruits calomnieux sur des comportements déplacés qu'on lui reprochait.

Il était très gêné de ces bruits sordides et venait crier à l'injustice devant la méchanceté de telles familles. Le père Placide, le voyant en confession, n'avait pas lieu de douter de sa bonne foi, car on est censé ne pas mentir lorsqu'on se confesse. L'avenir montra que le père Placide n'était pas un homme rancunier...

Ceci pour dire que ce genre d'histoire, lorsqu'elle éclate avec des témoignages directs ou des éléments probants, ne vient pas de nulle part. Il y a malheureusement très souvent une antériorité, et des personnes habituées à se dissimuler à travers des mensonges et des dehors respectables. Aucun des évêques qui venaient visiter le monastère n'était plus pieux que Monseigneur Paul.

Le Métropolite Emmanuel Adamakis, sachant tirer les leçons de ses prédécesseurs, semble choisir le garçon qui l'accompagne en tenant compte de la limite de majorité, et se garantir son consentement. Même s'il ne croit toujours pas que la Providence reste capable de mettre en lumière ce qu'il voudrait cacher.

Là encore, même si les témoignages sont souvent indirects, il y en a suffisamment pour laisser supposer qu'il y a une lointaine antériorité à son comportement indigne de sa fonction. Tout d'abord le témoignage rapporté du serveur du restaurant Avlaki, qui atteste que Monseigneur Emmanuel est un habitué, même s'il ignorait jusqu'à peu qu'il avait affaire à un ponte de l'orthodoxie. Ensuite, d'autres histoires plus sordides que je ne relaterai pas car je ne peux pas retracer leur cheminement jusqu'aux témoins directs.

Puisque le père Placide a recueilli Monseigneur Paul, qui s'est « fait jeter » de sa paroisse, j'espère qu'il aura la grandeur d'âme de recueillir également Monseigneur Emmanuel que nous serions heureux de lui offrir pour son monastère, suivant cette formule propre aux soldes : un à j'ter, un offert !

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