de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

mercredi 11 avril 2012

39- Le Pen

Quelqu'un m'a fait la remarque, il y a quelques jours, que ce blog est une sorte de microcosme du monde grec. On y trouve des intrigants qui essayent de prendre le pouvoir et qui, dès qu'ils l'ont, renient ceux qui leur ont confié ce pouvoir pour chercher à en avoir un autre plus grand (voir les modifications des statuts et ceux qui les ont signées). On y trouve des opportunistes qui essayent de jouer avec les idéaux du peuple pour faire leur trou. On y trouve des personnes qui rêvent d'un monde idéal, sans conflits, mais qui confondent sans conflit et sans action ; et en oubliant qu'ils doivent agir, ils oublient également que le monde est tel que nous le construisons chaque jour. On y trouve tout ce qui fait que quelques riches et influents personnages en Grèce ont ruiné leur pays sans se soucier de tous ceux qui aujourd'hui meurent de faim. Saint Kosmas d'Étolie disait de telles personnes : Certains Grecs parmi les riches possédants gouvernent les villages et sont au service des Turcs. Ceux-là torturent les chrétiens bien plus que les Turcs, et excitent les chrétiens à apostasier.
 
Cette réflexion débutera par un article du très respectable Alexandre Soljenitsyne paru dans Le Point le 24 mars 2012. Soljenitsyne est mondialement connu comme dissident du régime stalinien. Au même titre que des millions d'autres Russes, il a souffert de ce régime. Il a eu plus de chance que beaucoup d'autres car il a survécu et est aujourd'hui un témoin incomparable de cette période.

Soljenitsyne, dans cet article, appelle à voter pour Marine Le Pen, au nom de l'opposition au stalinisme, qu'il associe toujours à toutes les formes de socialisme. Je parlerai du socialisme dans un autre message sur ces réflexions de campagne électorale, et me concentrerai davantage aujourd'hui sur Marine Le Pen. 

Son discours nationaliste est plaisant. Elle n'oublie jamais de dissocier l'histoire de France de sa culture chrétienne. Son programme électoral présente des points intéressants. Sa volonté de sortir de l'euro, afin que nous puissions de nouveau contrôler notre politique monétaire, au même titre que le fait avec beaucoup de réussite la Suède, est objectif. Mais une chose me chiffonne dans l'analyse de Soljenitsyne. Pourquoi associer François Hollande à Staline, et ne pas associer Le Pen à Hitler ?

Le capitalisme à outrance qui a ruiné la Grèce et les Grecs et les conduit à la mort est-il un modèle préférable à celui du communisme ? Peut-on hiérarchiser Staline et Hitler entre un gentil et un méchant ? N'y a-t-il pas que des méchants ? De telles associations peuvent-elles être autre chose que des raccourcis simplistes ? Je crois que l'analyse de Soljenitsyne vient du fait qu'il a vécu et subi le communisme et que, dans sa philanthropie, c'est de ce traumatisme qu'il connaît qu'il veut préserver l'ensemble des hommes.

Pourtant, je crois qu'il ne faut jamais perdre de vue une chose : ce n'est pas l'idéologie affichée qu'il faut suivre, mais bien l'intégrité de celui qui parle au nom de cette idéologie. Alors regardons Le Pen. Au même titre que Soljenitsyne a parlé dans Le Point de Marine Le Pen, Le Monde a également parlé de son père le 24 mars, bien que ce soit en des termes moins élogieux.

Le journal nous raconte comment, durant la guerre d'Algérie, un enfant a vu son père se faire torturer et exécuter par des soldats français, comment cet enfant a caché une ceinture et un couteau que les soldats avaient oubliés, comment a agi le système judiciaire de l'époque pour étouffer le récit des témoins et protéger les soldats, comment cet enfant a vu gravé sur le couteau qui a servi à torturer son père : J. M. Le Pen 1er REP, comment ce couteau a été présenté à la justice dans une procédure en mai 2003.

Mon père a été sous-officier durant la guerre d'Algérie et a été décoré pour des faits de bravoure. Je publierai un jour le journal qu'il a tenu au jour le jour durant cette guerre. Je connais plusieurs personnes, dans la communauté grecque de Lyon, qui ont servi la France à cette époque. Il est bien évident que la grande majorité des soldats étaient exemplaires. La distinction se faisait plus entre les légionnaires qui passaient avant dans certaines missions et les appelés du contingent. Mais j'attire l'attention sur le fait que ceux qui ont eu un comportement de barbares indignes de leur uniforme ne peuvent aujourd'hui être regardés comme des exemples dans lesquels nous placerions nos espoirs d'un monde meilleur.

A quoi aurait servi le Christ si son discours avait été différent de ses actes ? A rien, si ce n'est à nous montrer à ce moment-là qu'il aurait été un imposteur. De la même façon, je veux bien voter pour Marine Le Pen si mon idéal est un nationalisme, car son discours et ses actes sont du nationalisme, mais je serai en décalage complet avec mes idéaux si je vote pour elle à cause des valeurs chrétiennes dont elle se revendique parfois. Il n'y a pas plus de liens entre le nationalisme religieux et le christianisme, qu'entre le sionisme et le judaïsme.

Il y a en France, en Grèce, et dans de très nombreux pays, une aversion (souvent non dite) pour les peuples arabes, les Turcs, et autres musulmans, bien qu'en réalité une part non négligeable de ces peuples ne soit pas musulmane. Cette aversion vient bien évidemment des guerres et invasions, mais pas seulement. Les croisés ont pris Constantinople et l'ont pillée avec une sauvagerie sans nom, et pourtant il y a aujourd'hui de cordiales relations entre nos élites religieuses et politiques, ce qui n'est pas le cas avec les musulmans. Cette aversion vient de la durée de ces occupations subies, des antagonismes religieux, des circonstances politiques...

Pourtant, l'idéal religieux du christianisme est un monde où Dieu est tout en tous, où il n'y a plus ni Juifs ni Grecs, ni esclaves ni hommes libres (Gal. 3, 28). Un monde de bisounours, comme le dit Marine Le Pen ? Bien que l'allusion aux bisounours ne soit qu'une caricature sémantique, elle ne doit pas perdre de vue que le monde est tel que nous le construisons. On dit que le capitalisme, c'est l'exploitation de l'homme par l'homme, et que le communisme, c'est l'inverse ! N'y a-t-il pas un système politique qui sorte de cette fatalité ? Quel que soit le système auquel nous nous référons, seul ce qu'en font les hommes qui contrôlent le pouvoir peut faire que le système porte de bons ou de mauvais fruits.
 
Le réseau Voltaire, très bien informé des informations du Proche et du Moyen-Orient, a montré comment Robert Gates, secrétaire d’État à la Défense, avait réussi, en 2007, à mettre en place un plan de sortie de crise avec l'Iran et comment Georges W. Bush et Dick Cheney, ses responsables d'alors, ont saboté son plan pour favoriser des entreprises d'armement dans lesquelles ils avaient des participations, au détriment des intérêts de leur pays. Il est possible de construire de belles choses mais, bien souvent, les ennemis des bisounours ne sont pas les méchants des autres pays. Ils sont au milieu de nous.

C'est saint Paul qui conclura ce message, par ce qui sont certainement les plus belles paroles qu'il a écrites : Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas l'amour, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit. Et quand j’aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et toute la connaissance, quand j'aurais même toute la foi jusqu'à transporter les montagnes, si je n'ai pas l'amour, je ne suis rien. Et quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais même mon corps pour être brûlé, si je n'ai pas l'amour, cela ne me sert de rien. (I Cor. 13). Marine Le Pen, dans la continuité de son père, reprend des thèmes qui semblent importants aux chrétiens, mais elle en exclut tout amour et toute charité, ce qui vide de son sens ces mêmes thèmes.

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