de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

vendredi 10 février 2012

20- Surcoûts



Dès les premiers jours, il a été clair qu'il n'y aurait pas ou peu de bénévoles qui viendraient aider. Nous avons donc confié le travail de manœuvre à des jeunes à qui nous donnions 50 euros par jour. Ces jeunes le voyaient plutôt comme du babysitting que comme un travail. Ils venaient quand nous avions besoin et quand ils pouvaient. Ils ont été une dizaine à se relayer.

Nous avons commencé par enlever le papier peint, le parquet et les meubles restants. Au bout de quelques jours, un samedi soir après les vêpres, une dame qui connaît la communauté depuis toujours est venue voir ce que nous faisions dans l'appartement. Derrière sa discrétion, il y avait une grande perspicacité. Elle a tout de suite vu les limites de nos travaux : nous gardions toutes les cloisons. Il y avait beaucoup de place perdue avec le couloir, la partie privée (chambres) était au cœur de la partie public (salon), si bien que les pièces allaient rester petites et que personne ne pourrait avoir d'intimité s'il y avait un invité dans la maison.

La tendance moderne est d'abattre les cloisons pour favoriser les grands espaces, ce que l'on appelle les pièces à vivre. En trois minutes, elle m'a redessiné l'appartement et j'ai su qu'elle avait raison : une cuisine/séjour dans laquelle on entre et où sont reçus les invités, séparée des pièces privées non accessibles aux invités. A la place d'une cuisine de 10m², d'un salon de 20m², d'un immense couloir et de chambres allant de 7 à 10 m², nous pouvions avoir une grande pièce de 35 m² et des chambres allant de 10 à 16 m².

J'en ai aussitôt parlé au père. Il n'a pas eu l'assentiment familial tout de suite mais, après réflexion, l'idée s'est imposée. Le dimanche suivant, madame le Consul visitait l'appartement et je lui parlais de ce projet. Je pensais de bonne foi qu'elle était du comité et que son assentiment valait bénédiction pour valider le projet. L'idée lui a beaucoup plu, mais elle n'était pas du comité, comme nous allons le voir. Afin de m'assurer qu'abattre les cloisons était ce que le père voulait, je lui ai donné une massette et, comme pour la pose symbolique d'une première pierre, il a donné sur la cloison de la cuisine le premier coup pour l'abattre. Trois heures plus tard, toutes les cloisons étaient au sol et les premiers morceaux partaient à la déchetterie.

Le lendemain matin, Nicolas Angeloudis est arrivé, furieux, en criant qu'il voulait ses cloisons. J'aurais pu les lui mettre dans le coffre de sa voiture, empaquetées dans des sacs, mais je crois que ce n'est pas ce qu'il attendait. Là, j'ai su que madame le Consul n’était pas du comité... 

Ce point n'a pas généré un surcoût très important. Si nous avions gardé les cloisons, il aurait fallu y faire des saignées pour encastrer l'électricité, reboucher et tout ré-enduire. C'était un travail important. Le peintre a accepté de ne pas modifier son devis de 3000 euros et de s'occuper de recréer toutes les nouvelles cloisons. L'électricien était content car il allait pouvoir faire un travail de meilleure qualité. Nous allions avoir des cloisons isolées. Il y aurait besoin de moins de travail de manœuvre, notamment pour faire les saignées. Le surcoût pour tout raser et tout refaire était estimé à environ 600 ou 700 euros.

Restait la question des fenêtres. La destruction totale des cloisons avait eu du mal à passer et déjà il fallait tenter un autre coup de force. Fort de la bénédiction du père, j'envoyais alors un mail au président. Le côté va-t'en-guerre de ce mail me valait d'être convoqué le dimanche suivant dans le bureau en présence de Vassilia, Nicolas et trois figurants. Je ne sais pas pourquoi, mais je trouve qu'il y a une grande chaleur quand Nicolas me dit : " Toi, mon coco, viens là, j'ai à te parler ! " L'idée était de me montrer clairement que personne dans le comité ne suivait ce projet.

J'avais des arguments pour étayer le fait qu'il fallait changer les fenêtres : économie de chauffage pour la communauté et prix livré-posé en sortant les anciens cadres et en refaisant toute la maçonnerie moins cher que le seul prix d'achat public des fenêtres. De plus, je proposais un payement différé à long terme en trouvant moi-même les financements intermédiaires. Je me rappelle Vassilia, indignée, qui me disait qu'il n'était pas question que la communauté paye ces dépenses et qu'elle n'en avait pas les moyens. Je n'ai rien dit sur le fait qu'elle taisait que la communauté avait 75000 euros. Les comptes sont censés être accessibles à tous et faire croire que l'on n'a rien pour garder le contrôle sur les finances ne correspond pas au fonctionnement d'une association digne de ce nom. Ce que je faisais ne correspondait pas non plus au fonctionnement normal d'une association, mais j'ai déjà expliqué que j'avais pris le parti d'obéir au père, et non au comité.

Durant cette conversation dans le bureau, l'un des membres s'est alors joint à mon point de vue. Ça a fait éclater l'unité affichée du comité et rendu difficilement tenable le refus de changer les fenêtres. J'ai finalement eu un accord à contrecœur pour ces fenêtres. Ce sont des amis de la communauté qui veulent rester anonymes qui m'ont prêté l'argent pour faire l'avance des frais. Pour cela, ils ont utilisé le découvert que la banque leur accordait. De toute façon, le père m'avait dit que tout serait remboursé avant la fin des travaux.

Ce jour-là, le père a commencé une " liste noire " de personnes dont il fallait absolument se débarrasser pour les élections du prochain comité. Nous y reviendrons plus en détail dans la série de messages qui suivra celle dédiée aux travaux.

Bon gré, mal gré, le changement de fenêtres a été validé et la commande a été passée. Vu le délai de fabrication, il fallait se dépêcher pour ne pas risquer de devoir interrompre les travaux : les fenêtres devaient être changées avant que l'on ne commence à enduire les murs.

Il restait un nouveau point à aborder : les radiateurs et le système de chauffage. C'est incontestablement le plus gros surcoût qui a été généré. Le devis initial prévoyait de garder les radiateurs. Mais nous avions une mauvaise expérience de la salle paroissiale. Lorsque nous avions démonté les radiateurs de la salle pour les nettoyer et les repeindre, plusieurs d'entre eux ne fonctionnaient plus ou très mal. Après vérification, ça ne venait pas d'un problème de purge, ni d'un problème de circulation du système, mais des radiateurs eux-mêmes qui étaient emboués.

Avec le temps, des dépôts se forment à l'intérieur des radiateurs. Si ces dépôts se décollent, ils bouchent doucement le fond et gênent la circulation. Parfois même ils l'en empêche. Vider un radiateur pour des travaux puis le remettre en pression est souvent un déclencheur pour que les dépôts se décollent des parois et bouchent le fond. Dés-embouer un radiateur coûte cher. Ne pas le faire induit le risque que les boues aillent dans le système de circulation, arrivent à la chaudière et fassent griller le circulateur. C'est alors la chaudière qui peut casser avec des dégâts bien supérieurs au coût de tous les radiateurs réunis. Le plombier que nous avions sollicité travaille parfois pour les assurances : je ne décris pas des risques fantaisistes, mais des situations qu'il a rencontrées. Le père a donné sa bénédiction, les anciens radiateurs, sans valeur, sont partis à la déchetterie et de nouveaux radiateurs ont été commandés. Ils ont été choisis pour leur design, leur facilité d'entretien et surtout leur pouvoir thermique et leur inertie.

Dernier détail avant de vous laisser pour ce soir : la cuisine. Les anciens meubles situés sous l'évier étaient en partie pourris à cause des fuites d'eau antérieures. Et puis je ne voyais pas comment je pouvais récupérer les quelques meubles encore utilisables et les associer à la nouvelle décoration. Les éléments les plus chers (four, plaque chauffante...) ont été gardés, et le reste est parti à la déchetterie. Dès le mois de septembre, nous avions choisi, avec le père, une cuisine Ikea pour faire simple, beau et le plus économique possible.

Le surcoût de main-d’œuvre de tout ceci a été de 500 euros pour la pose de la cuisine, 500 euros pour le changement de toutes les fenêtres, 1000 euros pour reprendre intégralement tout le système de chauffage en encastrant le réseau, plus les manœuvres et les matériaux dont je reproduirai très bientôt le détail des factures.

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